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La Cour de cassation, dans un arrêt du 28 septembre 2023 (n° 22-21.012) publié au Bulletin, apporte des précisions importantes quant à l’évaluation d’un bien par le juge de l’expropriation et, plus précisément, sur la prise en compte des possibilités légales et effectives de construction. 

Dans ce dossier, l’autorité expropriante s’était pourvue en cassation à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel dont il faisait grief de ne pas avoir tenu compte, à la date de référence, d’un périmètre d’attente de projet global qui limitait d’une manière drastique les possibilités de construction.

L’article L. 322-4 du code de l’expropriation dispose en effet que « l’évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à la date de référence prévue à l’article L. 322-3, de la capacité des équipements mentionnés à cet article, des servitudes affectant l’utilisation des sols et notamment des servitudes d’utilité publique, y compris les restrictions administratives au droit de construire, sauf si leur institution révèle, de la part de l’expropriant, une intention dolosive ».

Toutefois, la Cour d’appel de Bordeaux avait considéré que si « la parcelle était dans un secteur couvert par un PAPG (périmètre d’attente de projet global) qui limitait d’une manière drastique les possibilités de construction (…) à la date de référence (…) il ne peut en être tenu compte s’agissant d’une limitation provisoire (…) ».

La Cour de cassation confirme cette analyse en relevant que : 

  • Si l’article L. 322-4 du code de l’expropriation ne précise pas si les servitudes devant être prises en compte à la date de référence doivent être permanentes, 
  • En revanche, l’article L. 322-2 du même code prévoit que seules les servitudes et restrictions administratives affectant de façon permanente l’utilisation ou l’exploitation des biens à la date de référence doivent être prises en compte, 
  • Enfin, il résulte des débats parlementaires ayant précédé l’adoption de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985, qui a modifié l’article L. 13-15 I., alinéa 1er, devenu L. 322-2 précité, que le législateur a entendu aligner l’évaluation des terrains selon leur usage effectif et celle prévue pour les terrains à bâtir quant à la prise en compte des servitudes. 

Par conséquent, la Haute juridiction rejette le pourvoi de l’autorité expropriante après avoir rappelé que le périmètre d’attente d’un projet d’aménagement global a un caractère provisoire et devient inopposable au propriétaire par le seul écoulement du temps, de sorte qu’il ne constitue pas un élément de moins-value et n’a pas à être prise en compte pour l’évaluation du terrain. 

 
Les juridictions de fond sont donc invitées à écarter les limitations à construire qui sont temporaires, étant rappelé que certaines limitations sont déjà expressément exclues par le code de l’expropriation, dans le cadre de l’évaluation d’un bien exproprié, comme par exemple l’existence d’un emplacement réservé (voir articles L. 230-4 du code de l’urbanisme et L. 322-6 du code de l’expropriation