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Appréhender l’obligation de relogement : son étendue, son débiteur, son bénéficiaire, sa mise en œuvre et ses sanctions.

Dans le cadre d’une opération d’aménagement ou d’une opération d’expropriation, il est indispensable de tenir compte l’obligation de relogement.

D’une part, le non-respect de cette obligation fait obstacle à la prise de possession d’un bien et risque de retarder la réalisation d’un projet d’utilité publique (voir étape 4 de la phase judiciaire).

D’autre part, cette obligation relève de « l’ordre public social » et, partant, sa satisfaction est appréciée strictement par les juridictions. 

Pour appréhender cette question majeure, il est donc important de savoir : 

  1. Quelle est l’étendue de l’obligation de relogement ?
  2. Qui en est débiteur ? 
  3. Qui en est bénéficiaire ? 
  4. Quand la mettre en œuvre ?
  5. Comment la mettre en œuvre ?
  6. Quelles sanctions en cas de non-respect de l’obligation de relogement ?  

01. Quelle est l’étendue de l’obligation de relogement ? 

L’étendue de l’obligation de relogement est encadrée par : 

 La combinaison de ces dispositions implique ainsi : 

1. de proposer au moins deux offres de relogement de biens offerts en location

2. que les logements proposés :  

  • répondent aux normes minimales d’habitabilité, être en bon état d’entretien et remplir les conditions normales d’hygiène et de sécurité 
  • respectent les normes « HLM » 
  • correspondent en termes de surface et de composition aux besoins personnels et familiaux des occupants en tenant compte de leurs conditions de vie et de travail
  • correspondent aux possibilités financières des expropriés
  • portent sur des logements situées dans le ou la même arrondissement/canton/commune ou dans un ou une arrondissement/canton/commune limitrophe 

Conseils :

Identifier le cadre juridique dans lequel s’inscrit l’obligation de relogement en cas de superposition d’opérations (expropriation, arrêté de mise en sécurité, etc.) en gardant à l’esprit que seront applicables les dispositions les plus favorables à l’occupant

Ne pas confondre droit au relogement et droit de priorité prévu à l’article L. 314-5 du code de l’urbanisme bénéficiant aux commerçants, artisans et industriels

02. Qui est débiteur de l’obligation de relogement ? 

Aux termes de l’article L. 314-1 du code de l’urbanisme, l’obligation de relogement pèse sur : 

  • « la personne publique qui a pris l’initiative de la réalisation de l’une des opérations d’aménagement définies (à l’article L. 300-1 du même code) ou, 
  • qui bénéficie d’une expropriation». 

Les autorités débitrices de l’obligation de relogement peuvent choisir de  déléguer contractuellement à une autre entité la prise en charge de cette obligation (par exemple dans le cadre d’une concession d’aménagement).  

Conseils :

Se rapprocher d’acteurs institutionnels publics et privés dédiés notamment au relogement et à l’habitat (par exemple, communes, bailleurs sociaux, MOUS relogement, etc.)

Envisager une convention prévoyant la définition, l’accompagnement et la mise en œuvre du relogement (hors concession d’aménagement) 

03. Qui est bénéficiaire de l’obligation de relogement ? 

Par application combinée des articles L. 314-1, L. 314-2 du code de l’urbanisme et L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation, l’obligation de relogement bénéficie à « tous les occupants de locaux à usage d’habitation, professionnel ou mixte », cette qualité étant appréciée à la date de l’ordonnance d’expropriation. 

Par conséquent, sont concernés:

  • Les occupants de locaux à usage professionnel ou mixte
  • Les occupants de locaux à usage d’habitation, (uniquement s’ils occupent le bien à titre d’habitation principale
  • Les titulaires de droit réel (propriétaire, usufruitiers, bénéficiaires d’un droit d’usage ou d’habitation)  
  • Les locataires du bien (contrat de location écrit ou verbal) 
  • Les occupants de bonne foi (c’est-à-dire ceux qui se maintiennent dans les lieux en raison d’une décision de justice, d’un accord formel ou tacite du propriétaire, d’un droit légal au maintien dans les lieux). 

Au contraire, en sont exclus :  

  • les occupants sans titre
  • les occupants à l’encontre desquels un jugement définitif d’expulsion est intervenu 
  • les bénéficiaires de locations saisonnières 
  • les personnes ne bénéficiant que d’une autorisation précaire d’occupation 
  • les occupants entrés dans les lieux après l’ordonnance l’expropriation
  • les occupants de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal
  • les occupants ayant renoncé de manière claire et non équivoque au bénéfice de l’obligation 

Conseils :

Identifier, dès la préparation des dossiers d’enquêtes publique et de cessibilité, les occupants susceptibles de bénéficier d’un droit au relogement. 

Faire dresser un procès-verbal de constat par un commissaire de justice le jour de l’ordonnance d’expropriation pour figer la situation d’occupation. 

04. Quand mettre en œuvre l’obligation de relogement ? 

Le code de l’expropriation et le code de l’urbanisme n’indiquent pas avec précision à quel moment de la procédure d’expropriation doivent être formulées les deux offres de relogement. 

Toutefois, ces deux codes prévoient différents délais de nature à influer sur le moment de mise en œuvre de l’obligation:

  1. L’article L. 314-7 du code de l’urbanisme dispose que « toute offre de relogement (…) doit être notifiée au moins six mois à l’avance » et ; « l’occupant doit faire connaître son acceptation ou son refus dans un délai de deux mois, faute de quoi il est réputé avoir accepté l’offre ».
  1. L’article R. 311-5 du code de l’expropriation précise que les offres doivent mentionner la commune dans laquelle sont situés les locaux offerts, lorsque l’expropriant est tenu au relogement
     
  2. L’article R. 423-9 du code de l’expropriation indique que : « Il ne peut être offert un local de relogement à un propriétaire exproprié qui occupe tout ou partie de son immeuble que si cette offre a été acceptée par ce propriétaire avant la fixation des indemnités d’expropriation, afin de permettre au juge et, le cas échéant, à la cour d’appel, de tenir compte de ce relogement lors de la fixation des indemnités d’expropriation ». 

Conseils :

Afin de ne pas retarder la prise de possession et de tenir compte du relogement dans la fixation de l’indemnité d’expropriation, il est conseillé de proposer des relogements au stade des offres indemnitaires (lesquelles sont possibles dès l’arrêté d’ouverture d’enquête : voir étape 2 de la phase judiciaire)  

Si les offres de relogements ne peuvent être proposées avant la fixation de l’indemnité par le juge de l’expropriation, il est recommandé de formuler des offres indemnitaires sous la forme alternative.

Anticiper le délai de six mois ainsi que le délai contentieux d’une procédure accélérée au fond devant le juge de l’expropriation afin de solliciter régulièrement l’expulsion pour estimer la date de prise de possession. 

05. Comment mettre en œuvre l’obligation de relogement ? 

Aucun formalisme particulier concernant la présentation des offres de relogement n’est imposé par les textes. 

Conseils :

Les offres de relogement doivent être : 

suffisamment détaillées, afin de permettre à l’occupant d’en apprécier la consistance exacte, conformément aux critères détaillés au point 1.

réalisées par voie de notification postale, de signification par voie d’huissier ou de remise contre récépissé, afin de permettre au débiteur de l’obligation de relogement d’attester de la date d’accomplissement de son obligation, dans l’éventualité d’un contentieux (point 3)

être adressées individuellement à chacun des occupants du bien exproprié. 

06. Quelles sanctions en cas de non-respect de l’obligation de relogement ? 

Si ni le code de l’urbanisme ni le code de l’expropriation ne sanctionnent expressément le non-respect de l’obligation de relogement, cette circonstance fait obstacle à la prise de possession du bien (cf. étape 4 de la phase judiciaire) et risque de retarder la réalisation de l’opération en vue de laquelle l’expropriation a été prononcée.  

En outre, des sanctions financières sont possibles : 

Conseils :

Distinguer non-respect de l’obligation et refus des offres : si l’exproprié refuse deux offres sans motif légitime, la personne titulaire de l’obligation de relogement doit néanmoins être considérée comme ayant satisfait à ses obligations