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Par un arrêt du 30 octobre 2023 (n°474408) qui sera mentionné dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat reconnait la constitutionnalité des dispositions du code de l’urbanisme applicables aux opérations de restauration immobilière (L. 313-4, L. 313-4-1 et L. 313-4-2) en raison du contrôle du juge administratif dite de la « théorie du bilan ». L’ occasion également de rappeler l’application de ce contrôle dans le cadre de ces opérations.


Dans cette affaire, le requérant soulevait une question prioritaire de constitutionnalité en soutenant que les dispositions précitées du code de l’urbanisme méconnaissaient l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen protégeant le droit de propriété, en ce « qu’elles permettent l’expropriation d’un immeuble dont le propriétaire n’a pas fait connaître son intention de réaliser ou faire réaliser les travaux qui ont été prescrits dans le cadre d’une opération de restauration immobilière ».


Le Conseil d’Etat écarte toutefois ce moyen en considérant que la question ne présente pas un caractère sérieux dès lors qu’il appartient au juge administratif « lorsqu’est contestée devant lui l’utilité publique d’une telle opération, de vérifier que celle-ci répond à la finalité d’intérêt général tenant à la préservation du bâti traditionnel et des quartiers anciens par la transformation des conditions d’habitabilité d’immeubles dégradés nécessitant des travaux et que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ».


La plus haute juridiction administrative rappelle également « qu’il appartient aussi au juge administratif, juge de la légalité de l’arrêté de cessibilité pris dans le cadre d’une opération de restauration immobilière, s’il est saisi d’une contestation en ce sens, de s’assurer que l’inclusion d’un immeuble déterminé dans le périmètre d’expropriation est en rapport avec l’opération déclarée d’utilité publique et de juger de la nécessité des travaux impartis au propriétaire par le programme de travaux qui lui a été notifié avant l’intervention de l’arrêté de cessibilité ».

Ces modalités de contrôle juridictionnel en matière d’expropriation – dégagées par l’arrêt du Conseil d’Etat du 28 mai 1971 « Ville Nouvelle-Est » et rappelées constamment en jurisprudence (voir par exemple : CAA Nantes, 28 décembre 2018, n° 16NT03709) – garantissent ainsi la constitutionnalité des dispositions précitées du code de l’urbanisme applicables aux opérations de restauration immobilière, au regard de l’article 17 de la DDHC.


Par ailleurs, cet arrêt a également le mérite de rappeler les modalités de contrôle dans le cadre précis de ces opérations.

Pour les sécuriser juridiquement, la personne publique compétente (l’Etat, la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent) devra donc s’assurer que :

  • L’opération répond à la finalité d’intérêt général tenant à la préservation du bâti traditionnel et des quartiers anciens par la transformation des conditions d’habitabilité d’immeubles dégradés nécessitant des travaux
  • les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente,
  • l’inclusion d’un immeuble déterminé dans le périmètre d’expropriation est en rapport avec l’opération déclarée d’utilité publique,
  • les travaux impartis au propriétaire par le programme de travaux qui lui a été notifié avant l’intervention de l’arrêté de cessibilité sont nécessaires.


La notice explicative – constituant un des documents nécessaires au dossier préalable à la déclaration d’utilité publique (article R. 112-4 du code de l’expropriation ; voir point 2 de la phase administrative) – devra notamment faire la démonstration de la satisfaction de ces conditions.