Si la solution retenue par la Cour de cassation, dans son arrêt du 23 mars 2023 (n° 21-20.289), est parfaitement logique et cohérente au regard des dispositions du code de l’expropriation et de l’esprit les régissant, sa publication au Bulletin démontre qu’une clarification était nécessaire.
Dans cette affaire, une cour d’appel avait déclaré irrecevable l’appel interjeté par une autorité expropriante aux motifs que cette dernière avait réglé les condamnations principale, accessoires ainsi que les dépens et l’indemnité de procédure prononcées par le jugement frappé d’appel et que, par conséquent, elle avait acquiescé au jugement.
Formant un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt, l’autorité expropriante relevait que l’acquiescement n’était pas certain par le seul règlement des indemnités dans la mesure où l’appel du jugement fixant les indemnités d’expropriation est dépourvu d’effet suspensif (R. 311-25 du code de l’expropriation), en sorte que la seule exécution de la décision du premier juge ne valait pas acquiescement.
La Cour de cassation accueille favorablement ce moyen pour casser et annuler l’arrêt de la Cour d’appel en rappelant :
- Tout d’abord, sur le fondement des articles 409 et 410 du code de procédure civile, que « si l’acquiescement peut être exprès ou implicite, il doit toujours être certain. Il doit résulter d’actes ou de faits démontrant avec évidence et sans équivoque l’intention de la partie à laquelle on l’oppose » ;
- Ensuite, « que la seule exécution de cette décision du premier juge ne pouvait valoir acquiescement ».
Cette précision est d’importance en ce que la solution retenue par l’arrêt censuré de la Cour d’appel aurait conduit une autorité expropriante à devoir opter entre :
- Soit, une prise de possession rapide en renonçant à une voie de recours ;
- Soit, une absence de prise de possession afin de pouvoir interjeter appel du jugement fixant les indemnités de dépossession.
En effet, la prise de possession d’un bien n’est notamment possible qu’après le paiement ou, en cas d’obstacles, la consignation des indemnités (voir étape 4 de la phase judiciaire).
S’il était ainsi considéré que le paiement de l’indemnité ou sa consignation valait acquiescement au jugement, l’autorité expropriante aurait été contrainte de renoncer à une voie de recours afin de prendre possession du bien.
Une telle logique entre manifestement en contradiction avec l’esprit régissant les dispositions du code de l’expropriation qui doit permettre une maitrise foncière rapide afin de réaliser un projet déclaré d’utilité publique.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation a donc le mérite de rassurer les autorités expropriantes qui peuvent prendre possession d’un bien exproprié en payant ou, en cas d’obstacles, consignant les indemnités fixées en première instance tout en conservant le bénéfice d’une voie de recours pour contester le montant de ces indemnités.