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Aux termes d’un arrêt publié au Bulletin en date du 7 décembre 2023 (n° 22-21.409), la Cour de cassation précise que seul le liquidateur judiciaire, attrait dans la cause, a qualité pour soulever la fin de non-recevoir tirée du défaut de notification, à son profit, de l’offre d’indemnisation préalable à la saisine du juge de l’expropriation. L’occasion de rappeler l’importance d’identifier en amont de la procédure les personnes habilitées à recevoir une offre, en matière d’expropriation.

Tout d’abord, précisons que, dans le cas d’espèce, l’autorité expropriante avait notifié une offre d’indemnisation aux héritiers d’une personne décédée en omettant le liquidateur judiciaire, à qui copie du mémoire de saisine avait été adressé en cours d’instance.

Constatant l’irrégularité de la procédure, les héritiers ont soulevé une fin de non-recevoir, rejetée par la Cour d’appel aux motifs qu’elle ne pouvait être invoquée que par celui auquel elle portait préjudice, c’est-à-dire le liquidateur et qu’il convenait de relever, d’une part, que la situation avait été régularisée tant en première instance qu’en appel, et que d’autre part, le liquidateur ne soulevait pas l’irrecevabilité de la procédure.

La Cour de cassation confirme l’analyse procédurale du juge d’appel en précisant que :

Si « La cour d’appel a relevé qu’un mois au moins avant la saisine du juge de l’expropriation, l’offre d’indemnisation prévue par l’article L. 311-4 du code de l’expropriation aurait dû être notifiée par l’expropriant au liquidateur, qui avait seul qualité pour l’accepter et recevoir l’indemnisation », elle a également constaté que « le liquidateur, attrait dans la cause, n’avait pas soulevé la fin de non-recevoir tirée du défaut de notification préalable de cette offre à son profit, laquelle n’est pas d’ordre public » privant le juge de la soulever d’office, de sorte que cette fin de non-recevoir devait être écartée.

Cet arrêt est ainsi l’occasion de rappeler l’importance d’identifier les destinataires réguliers d’une offre d’indemnisation, mais aussi de maitriser les règles de procédure civile dans le cadre de la fixation judiciaire des indemnités d’expropriation.

Dans le cas de l’arrêt commenté, l’irrégularité procédurale n’a pas eu de conséquence, mais si le liquidateur avait soulevé la fin de non-recevoir, cela aurait nécessité de reprendre toute la procédure de fixation judiciaire comprenant tous les délais incompressibles prévues par le code de l’expropriation (voir à partir de l’étape 2 de la phase judiciaire).

Cette situation aurait ainsi causé un retard dans la prise de possession qui, dans certains cas, peut s’avérer extrêmement préjudiciable pour une autorité expropriante dans la réalisation d’une opération déclarée d’utilité publique.

Aussi, il est essentiel d’identifier – en amont de la notification des offres – les personnes pouvant régulièrement les recevoir et, si nécessaire, de procéder à des désignations judiciaires.  

A cet égard, rappelons que :

  • Une société en liquidation est régulièrement représenté par son liquidateur (comme le rappelle l’arrêt commenté) ;
  • Un mandataire ad hoc peut être désigné par le Tribunal de Commerce pour une société dissoute n’ayant pas liquidé l’ensemble de son patrimoine ;
  • Une personne sous tutelle est régulièrement représenté par son tuteur (article 475 du code civil),
  • Un syndicat des copropriétaires est régulièrement représenté par son syndic (article 18 de la Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) qui peut également être désigné sur requête adressée au président du Tribunal judiciaire compétent (article 47 du décret du 17 mars 1967) ;
  • S’agissant des personnes décédées et dont la succession n’est pas régularisée, il existe la possibilité de faire désigner un curateur à succession vacante (articles 809 et suivants du code civil ; articles 493 et suivants du code civil) ;
  • En cas de propriétaires introuvables, un administrateur judiciaire peut être désigné par le Tribunal judiciaire (articles 812 et suivants du code civil)